L’alcool est-il mauvais pour la musculation ?

Modifié le 20 décembre 2023

Temps de lecture : 5 minutes
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choix entre de l'alcool et du lait après la musculation

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Baisse de la production de testostérone, récupération musculaire entravée, la consommation d’alcool serait l’ennemi numéro 1 des adeptes de musculation et pourrait ruiner la progression.

Les effets négatifs de l’alcool sur la prise de muscle sont-ils réellement avérés ou largement exagérés ? 

L’alcool est-il un poison pour les muscles ?

La consommation d’alcool à forte dose exerce une toxicité sur notre organisme, qui affecte de nombreux organes (foie, cœur, système nerveux…) et augmente le risque de cancer.

Mais on sait aussi que l’alcool est mauvais pour les muscles car 40 à 60 % des malades alcooliques souffrent de maladies des muscles squelettiques.

La question est donc : à partir de quelle dose cela pose-t-il problème ?

Et est-ce que ce problème se manifeste même en cas de prise aigüe (ponctuelle) ou uniquement de façon chronique ?

Quel est l’impact de la consommation d’alcool sur la production de testostérone ?

L’alcool et la pratique sportive feraient tout d’abord mauvais ménage en raison de la propension de l’alcool à réduire la production de testostérone.

C’est quelque chose d’assez intuitif que vous avez probablement constaté si vous êtes un homme : après une soirée bien arrosée, votre organe érectile fonctionne souvent moins bien.

Pour autant, il n’est pas certain que la cause de ce symptôme soit la baisse directe de la testostérone.

Voici ce que les études ont trouvé sur ce point particulier :

  • Dans le cadre d’une étude finlandaise, 8 jeunes hommes ont reçu 1,5 g d’alcool par kg de poids corporel, l’équivalent de 10 bières, sur 3 heures. Grâce à des analyses sanguines régulières, une baisse de 23 % du taux de testostérone a été mise en évidence, 10 h et 16 h après le début d’administration de l’alcool. 
  • Des chercheurs néerlandais ont étudié les effets d’une consommation modérée d’alcool au quotidien (4 bières par jour pendant 3 semaines). Elle a conduit à une baisse du taux de testostérone de 6,8 %.
  • Des chercheurs finlandais ont constaté que 2 heures après avoir bu 3 bières chez de jeunes adultes d’une vingtaine d’années, le taux de testostérone augmentait de 17% environ.

On peut constater qu’il y a une différence entre les effets d’une consommation ponctuelle et des effets répétés et que plus la dose augmente plus le taux de testostérone baisse.

Néanmoins les chercheurs ne pensent pas que c’est un effet direct sur la testostérone qui explique la baisse de la qualité des érections après avoir bu mais plutôt la hausse du cortisol à cause de l’alcool.

Le cortisol est une hormone du stress qui s’oppose à la relaxation nécessaire pour une bonne érection.

L’alcool réduit-il le taux de synthèse des protéines ? 

La masse musculaire dépend de l’équilibre entre la fabrication de nouvelles protéines (anabolisme) et leur dégradation (catabolisme).

Si la consommation d’alcool ne va pas favoriser la destruction des protéines, elle a en revanche un impact négatif sur leur anabolisme.

Des experts en nutrition du sport ont cherché à quantifier cette réduction de synthèse des protéines myofibrillaires après un entraînement en résistance liée à la consommation d’alcool. Ces protéines constituent les fibres musculaires et sont responsables des capacités contractiles du muscle.

Ils ont mis en évidence que par rapport à l’absence de consommation d’alcool et la prise de 500 mL de protéines de whey, la consommation de 12 verres après la séance de musculation :

  • réduit de 24 % la synthèse des protéines myofibrillaires quand elle est co-ingérée avec des protéines ;
  • réduit de 37 % la synthèse des protéines myofibrillaires quand elle est co-ingérée avec des glucides.

Des chercheurs américains ont quand à eux mis en lumière le phénomène qui explique cette diminution de la synthèse des protéines à cause de l’alcool.

Ils ont recruté 10 hommes et 9 femmes sportifs, qui ont été soumis à un entraînement physique (des séries de squats). Ils ont ensuite consommé de l’alcool ou un placebo.

Avant l’exercice, puis 3 et 5 h après, des biopsies ont été réalisées au niveau du muscle vastus lateralis, situé sur le côté latéral de la cuisse. Ils ont découvert que chez les participants masculins, l’ingestion d’alcool atténuent la phosphorylation de mTor provoquée par l’entraînement.

Or, la voie mTor est la principale voie métabolique qui contrôle la synthèse des protéines. Après un exercice physique, elle est activée, ce qui se traduit par ces phosphorylations (des modifications chimiques). L’alcool entrave donc ce phénomène, réduisant la synthèse protéique. 

Là encore, ce sont bien des doses massives d’alcool qui conduisent à une réduction de la synthèse des protéines. 

Alcool avec modération et sport, pas forcément une combinaison impossible

L’alcool ne freinerait pas la croissance musculaire 

L’alcool a un impact sur le taux de synthèse protéique, mais cela se répercute-t-il sur le gain de masse musculaire ? Une expérience menée chez la souris apporte des éléments de réponse.

Les chercheurs sont intervenus sur une des pattes de l’animal, réalisant une modification anatomique pour provoquer le surdéveloppement d’un des muscles de la patte (le muscle plantaire) pour la compenser. 

Une partie des animaux a reçu une dose d’alcool au quotidien pendant 14 jours. À l’issue de cette période, les scientifiques ont constaté que le gain musculaire a été équivalent entre les deux groupes d’animaux, d’environ 90%. L’alcool n’a donc pas contrarié la croissance musculaire.

L’alcool n’a pas d’impact négatif sur la récupération musculaire 

Parmi les griefs retenus envers l’alcool, figure son impact potentiel sur les capacités de récupération après une séance d’entraînement, ce que ne corroborent pas forcément les études scientifiques.

Dans le cadre d’une étude américaine, 10 sportifs ont réalisé deux sessions de musculation à une semaine d’intervalle. À la suite de l’une, ils ont ingéré une boisson alcoolisée (contenant 1,09 g d’éthanol par kg de masse maigre, ce qui est une dose élevée) ou sans alcool.

La consommation ponctuelle d’alcool n’a eu aucun effet sur les courbatures ou la récupération de la force musculaire après la séance : il n’y a pas eu de différences au niveau du pic de puissance, du pic de force ou de la hauteur de saut.

Une méta-analyse a compilé les données issues de cette étude et de 11 autres du même type. Elle a conclu que la consommation d’alcool après exercice de résistance ne modifie pas la force, la puissance, l’endurance musculaire, les douleurs, le taux de perception de l’intensité de l’effort dans la phase de récupération.

Mais attention, je ne vous recommande pas pour autant de boire sans retenue.

En effet, la consommation régulière d’alcool peu importe son origine bière, vin, rhum, whisky (plus de 2 verres par jour environ) augmente les risques de plusieurs cancers.


Références :

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  10. Levitt DE et al. Alcohol after Resistance Exercise Does not Affect Muscle Power Recovery [published online ahead of print, 2018 Jan 29]. J Strength Cond Res
  11. Lakićević, N. The Effects of Alcohol Consumption on Recovery Following Resistance Exercise: A Systematic Review. J. Funct. Morphol. Kinesiol. 2019, 4, 41. 

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