Faire du sport à l’annonce du diagnostic d’un cancer augmenterait les chances de survie

Modifié le 22 avril 2024

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Un homme fait du vélo d'appartement sous le regard bienveillant d'une femme.

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La pratique régulière d’une activité physique contribue à prévenir l’apparition de nombreuses formes de cancer. Une fois la maladie déclarée, le sport représente un allié de premier plan pour alléger les signes de la maladie et orienter favorablement son évolution.

Bienfaits du sport en cas de cancer

En France, le cancer représente la première cause de décès chez les hommes et la deuxième chez les femmes. En 2023, il y a eu 433 136 nouveaux cas de cancers et 157 400 décès par cancer dans notre pays.

La sédentarité figure parmi les multiples facteurs qui augmentent le risque de développer la maladie. Selon l’Organisation mondiale de la santé, « elle est la cause principale de 21 à 25% des cancers du sein ou du côlon. » Pour les adultes, l’OMS préconise ainsi 150 minutes d’exercice physique modéré par semaine, ou 75 minutes d’activité intense.

Ces recommandations s’appliquent à la population générale, mais la pratique sportive pourrait-elle apporter des bienfaits aux personnes chez qui un cancer a été diagnostiqué ? De nombreux travaux ont exploré cette question, avec des conclusions convergentes.

Baisse de la mortalité

Des chercheurs chinois ont réalisé une méta-analyse de neuf études consacrées aux effets de l’activité physique en cas de cancer. Elles ont porté sur 21 811 personnes, parmi lesquelles 2 386 sont décédées des suites de cette maladie.

Les analyses ont révélé que l’activité physique est associée à une meilleure survie des personnes ayant reçu un diagnostic de cancer. Le taux de mortalité des patients pratiquant une activité physique est en effet diminué de 34 %, quel que soit le niveau d’activité exercé, par rapport aux personnes sédentaires.

Une protection même à faible intensité

Graphique représentant la mortalité en fonction du niveau de sédentarité.
La mortalité par cancer augmente avec le temps de sédentarité.

Une autre équipe est arrivée à des conclusions semblables sur l’effet protecteur de l’activité physique. Lorsque les participants ont été séparés en trois groupes selon leur niveau de pratique, il est apparu que les personnes les moins actives avaient un risque accru de décès par cancer de 52% par rapport aux plus actives. Pour toute substitution de 30 minutes de sédentarité par de l’exercice physique d’intensité légère, la réduction du risque de mortalité lié au cancer atteignait 8%, et 31% en cas d’activité modérée à soutenue.

Réduction du risque d’effets indésirables

La pratique sportive apparaît en mesure d’atténuer certains signes invalidants associés au cancer. Une revue de la littérature a par exemple montré que l’entraînement de résistance, associé ou non à un entraînement aérobie, permet d’atténuer la fatigue provoquée par le cancer de la prostate et améliore la qualité de vie des malades.

Ces bienfaits contre la fatigue ne se limitent pas à cette forme de la maladie. L’analyse de 70 études sur différents types de cancers a mis en évidence une baisse de la fatigue grâce au sport, aussi bien pendant la phase active de traitement qu’à son issue.

Des effets bénéfiques ont aussi été constatés chez des personnes ayant suivi un entraînement physique d’un an après un traitement de chimiothérapie contre un cancer colorectal, notamment pour le fonctionnement social, la douleur ou les troubles digestifs.

Chez des malades atteints d’un cancer du sein ou de la prostate, un entraînement de 4 semaines sur vélo d’appartement s’est traduit par une amélioration des fonctions cognitives.

Des rechutes moins fréquentes

Par ailleurs, le sport pourrait limiter le risque de récidive chez les patients en rémission. Les auteurs d’une synthèse de 36 études conduites auprès de 68 000 patients ont conclu que :

des niveaux supérieurs d’exercice après un diagnostic de cancer étaient associés à une réduction de 21 % à 35 % du risque de récurrence du cancer


Prue Cormie et al.

Mécanismes biologiques

Plusieurs mécanismes biologiques sont à l’origine de cette baisse du risque de récidive et de mortalité chez les personnes souffrant d’un cancer sous l’effet du sport.

Contrôle de la sécrétion d’insuline

L’insuline fait partie des facteurs de croissance cellulaire présents au sein de l’organisme, qui stimulent la division des cellules et favorisent leur survie. La plupart des cellules cancéreuses expriment à leur surface une quantité plus élevée qu’à l’accoutumée de récepteurs à l’insuline. Elles sont donc plus sensibles à des niveaux élevés de cette hormone dans le sang.

La liaison de l’insuline à ses récepteurs déclenche l’activation de la voie de signalisation PI3K-Akt-mTOR, qui régule la prolifération cellulaire. Son activation excessive engendre ainsi des divisions incontrôlées, une des caractéristiques du cancer.

Niveaux d’insuline et mortalité liée au cancer

Chez les personnes atteintes de cette maladie, un taux élevé d’insuline est associé à un mauvais pronostic. Par exemple, au sein d’un groupe de 512 femmes souffrant d’un cancer du sein, une concentration d’insuline à jeun élevée est associée à une multiplication par deux le risque de survenue de métastases et par trois de la mortalité.

Un surrisque de mortalité a également été observé chez des personnes atteintes d’un cancer colorectal présentant un niveau élevé de peptide C, qui reflète la sécrétion d’insuline.

La pratique du sport a démontré sa capacité à abaisser la concentration sanguine à jeun d’insuline, à la fois en cas de cancer du sein et du côlon.

Inflammation et immunité

Une inflammation généralisée de faible intensité, mais persistante sur le long terme, promeut le développement des tumeurs. En effet, cette situation est associée à la présence massive de macrophages au sein des tissus cancéreux. Ces cellules immunitaires libèrent des messagers, les cytokines, qui activent les voies de signalisation favorisant la prolifération des cellules.

Des niveaux élevés de témoins de l’inflammation comme la protéine C-réactive ont ainsi été associés à un taux de mortalité plus élevé pour de nombreux types de cancer.

Là encore, la pratique sportive apparaît en mesure de tempérer ce phénomène, comme l’a montré l’analyse de trois études ayant rassemblé 215 patientes atteintes d’un cancer du sein. Une partie d’entre elles a suivi un protocole d’entraînement de musculation d’une durée de 1 an. Chez les patientes qui ont gagné de la force et/ou qui ont perdu au moins 2kg, le taux de protéine C réactive a diminué de façon progressive.

Une femme âgée s'entraîne à la salle de sport.
Un gain de force pourrait atténuer les niveaux d’inflammation.

Des lymphocytes tueurs plus efficaces

La pratique d’une activité physique semble par ailleurs bénéfique pour l’immunité antitumorale. Une étude menée auprès de 53 femmes souffrant de cancer du sein a mis en évidence qu’une activité aérobie d’intensité modérée stimule l’activité des lymphocytes NK de près de 7%. Ces défenses immunitaires sont capables de détruire les cellules cancéreuses, notamment grâce à leur équipement enzymatique redoutable.

Le rôle phare des myokines

Certains des mécanismes précédemment évoqués sont sous l’influence de la composition corporelle, qui détermine l’équilibre entre les masses graisseuses et musculaires.

Moins de muscle, plus de risque de décès

La composition corporelle a un impact important sur l’évolution du cancer. Dans un groupe de 3 262 personnes atteintes d’un cancer colorectal, un risque de mortalité augmenté de 40% a été constaté chez celles ayant à la fois une masse graisseuse importante et une faible masse musculaire.

En cas de cancer du sein, la sarcopénie – une situation caractérisée par une baisse drastique de la masse musculaire et de la force – est associée à une augmentation de la mortalité de 41%.

Action anti-proliférative

Graphique montrant l'action inhibitrice du sérum post-exercice sur les cellules de cancer du côlon.
Le sérum post-exercice riche en myokines réduit le nombre de cellules cancéreuses du côlon.

Ces liens entre la composition corporelle et l’évolution de la maladie s’expliquent en grande partie par l’action des myokines. Plus la masse musculaire est importante et stimulée, plus elle va produire ces composés aux effets protecteurs. Parmi leurs nombreux bienfaits, certaines d’entre elles jouent un rôle clef contre les phénomènes liés au cancer.

Les myokines sont produites par les muscles sous l’effet des contractions musculaires, et déversées pour partie dans la circulation sanguine. Des travaux ont ainsi examiné les effets d’échantillons de sang prélevés chez des volontaires lors d’un exercice physique.

Dans l’un d’eux, des personnes survivantes d’un cancer du colorectal ont réalisé un entraînement par intervalles à haute intensité, consistant en 4 sessions de 4 minutes à 85-95% de la fréquence cardiaque maximale. Lorsque leur sérum – la partie liquide du sang – obtenu juste après l’entraînement a été apposé sur des cultures de cellules de cancer du côlon, leur nombre a été réduit de façon significative.

Un effet transitoire à reproduire régulièrement

Ces bienfaits ont été attribués à la présence en nombre de plusieurs myokines, comme l’IL-6, l’IL-8 et le facteur de nécrose tumorale-α. Le sérum prélevé 2h plus tard, dont le contenu en myokines était redescendu à son niveau de base, n’a pas exercé cette action anti-proliférative.

Le même phénomène a été mis en évidence lors d’une étude menée chez des survivantes de cancer du sein. L’incubation de leur sérum prélevé après une session d’exercice combinant musculation et vélo stationnaire a réduit la viabilité de cellules cancéreuses du sein de près de 10% par rapport au sérum prélevé au repos.

Dans ces deux études, le sang prélevé après plusieurs semaines d’entraînement physique n’a en revanche pas eu d’effet inhibiteur sur les cellules cancéreuses. Les effets protecteurs du sport dans ce contexte seraient ainsi liés à l’exposition répétée aux myokines produites après chaque session d’entraînement.

Une efficacité plurielle

Les effets anticancéreux des myokines s’exercent de manière directe ou indirecte. Certaines comme l’irisine, la décorine ou l’oncostatine M atténue la prolifération des cellules cancéreuses, ainsi que leur capacité à migrer et à envahir d’autres foyers de l’organisme.

D’autres agissent sur divers processus en lien avec le développement du cancer. La protéine acide riche en cystéine (SPARC) limite par exemple les phénomènes d’angiogenèse qui, permettant la formation de nouveaux vaisseaux sanguins, contribuent à alimenter les tumeurs. L’IL-15 ou le BDNF agissent quant à eux sur l’immunité antitumorale. Ces actions complémentaires des myokines confèrent une protection complète contre la maladie.

Du sport sur ordonnance en France depuis 2017

En France, depuis mars 2017, les médecins peuvent prescrire de l’activité physique adaptée aux patients souffrant d’affections de longue durée. C’est une conséquence de la loi de modernisation de notre système de santé de janvier 2016. Le « sport sur ordonnance » peut se faire dans des centres adaptés ou en lien avec des kinésithérapeutes. D’après une enquête, 72% des Français qui se sont vus prescrire du sport par leur médecin ont suivi cette recommandation.

Naturellement, l’activité physique doit être adaptée en fonction de l’état de santé du patient. Mais globalement il vaut mieux en faire un petit peu que pas du tout. L’activité physique réduit aussi le risque d’autres maladies chroniques : troubles cardiaques, diabète…

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