Manger plus de cholestérol pourrait améliorer la santé

Modifié le 14 décembre 2023

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oeufs frais dans leur coquille posés dans un bol à côté d'un fouet

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Le cholestérol présent dans les aliments d’origine animale (œufs, abats, crustacés, viande rouge…) a été désigné pendant des décennies comme le coupable de l’épidémie de maladies cardiovasculaires. 

Aujourd’hui les cardiologues et autorités de santé font marche arrière et reconnaissent que les apports alimentaires en cholestérol n’ont que peu d’impact sur notre taux de cholestérol sanguin, car notre organisme ajuste sa production interne – assurée principalement par le foie et la muqueuse de l’intestin.

Et la présence de cholestérol dans notre organisme est vitale. Il joue de multiples rôles :

  • il entre dans la composition des membranes qui entourent chacune de nos cellules et participe à leur communication ;
  • il sert de précurseur à la production de la vitamine D et de l’ensemble des hormones stéroïdiennes(cortisol, œstrogènes, progestérone, testostérone…) ;
  • il entre dans la composition des sels biliaires, permettant la digestion des matières grasses et l’assimilation des vitamines liposolubles (A, D, E, K).

Mais aujourd’hui les recherches vont plus loin : non seulement il serait inutile de manger moins de cholestérol mais cela serait même nocif. Dans certains cas, consommer plus de cholestérol pourrait même améliorer la santé. Voici lesquels et comment.

Une meilleure immunité avec plus de cholestérol

Des chercheurs ont relevé une raréfaction de certaines cellules immunitaires chez des hommes présentant un faible taux de cholestérol total (151 mg/dl en moyenne) par rapport à ceux chez qui il est plus élevé (261 mg/dl en moyenne), comme les lymphocytes circulants qui patrouillent dans l’organisme pour détecter d’éventuels intrus, ou les lymphocytes T cytotoxiques qui détruisent les cellules infectées ou cancéreuses.

Une étude israélienne a confirmé ces observations en mettant en évidence que les personnes dont le taux de cholestérol LDL (celui que l’on surnomme pourtant le « mauvais cholestérol ») baisse en dessous de 70 mg/dl, ont un risque accru de cancer du sang, de fièvre ou de septicémie.

Au-delà de sa capacité à moduler l’action du système immunitaire, le cholestérol exerce une action directe contre les bactéries : les lipoprotéines qui assurent son transport dans le sang peuvent se lier avec des composants enchâssés dans la paroi des bactéries, les neutralisant et permettant leur élimination de l’organisme.

Mais les recherches montrent que le taux de cholestérol varie en cas d’infection. En particulier, il chute drastiquement au début d’une infection. L’hypothèse pour expliquer cette observation est que cette chute est la conséquence d’une utilisation accrue de cholestérol par le système immunitaire. Si c’est bien le cas, cela signifie donc qu’une consommation plus importante de cholestérol pourrait peut-être accélérer la guérison en cas d’infection.

Pour le déterminer, une étude a été menée en Chine auprès de patients hospitalisés souffrant d’une infection respiratoire ; ils ont été séparés en deux groupes, les uns recevant 600 mg de cholestérol sous la forme d’un jaune d’œuf, les autres un produit placebo, pendant 10 jours. L’alimentation était par ailleurs contrôlée et comparable dans les deux groupes avec notamment des apports totaux en protéines identiques.

À l’issue de cette période, le taux de cholestérol des patients du premier groupe a augmenté, ainsi que leur taux d’albumine et leur indice de masse corporelle tandis que les niveaux des marqueurs d’inflammation ont diminué, par rapport aux membres du second groupe. Au final, la sévérité de l’infection pulmonaire était atténuée grâce aux apports supplémentaire en cholestérol.

Plus de cholestérol pour un cerveau en meilleure santé

Le cerveau est l’organe le plus riche en cholestérol du corps humain puisqu’il contient à lui seul environ 20 % du stock total. Il est donc légitime de supposer que ce dernier joue un rôle important dans le fonctionnement du cerveau.

Dans le cerveau, le cholestérol entre dans la composition des membranes qui entourent les cellules cérébrales, leur conférant leur structure et facilitant la transmission des messages nerveux, mais la majorité est intégrée à la gaine de myéline, cette enveloppe protectrice qui entourent les longs prolongements des neurones. Lorsqu’elle est endommagée, en cas de sclérose en plaque par exemple, divers symptômes se manifestent : faiblesse musculaire, difficultés à coordonner les mouvements, fatigue….

Différentes études ont ainsi montré que diminuer la synthèse de cholestérol avec des médicaments augmentait la fréquence et la sévérité des poussées de sclérose en plaques (voir le livre Vaincre la sclérose en Plaques, Thierry Souccar Editions). De plus, des chercheurs ont démontré que chez l’animal, une supplémentation de la nourriture en cholestérol aide à restaurer l’intégrité de la gaine de myéline.

Par ailleurs, le cholestérol est indispensable au bon fonctionnement des récepteurs à sérotonine, un messager chimique impliqué dans la régulation de l’humeur. Une étude menée en 2018 au Mexique auprès de 261 personnes souffrant de dépression sévère, dont 59 avaient tenté de se suicider, et de 206 personnes en bonne santé, a mis en évidence un lien entre un faible taux de LDL et ces troubles psychiques.

Une quantité réduite de cholestérol dans l’organisme serait le reflet d’un déficit également au niveau cérébral, et expliquerait pourquoi les personnes souffrant d’hypocholestérolémie sont plus sujettes à la dépression. Les médicaments utilisés pour abaisser le taux de cholestérol comportent d’ailleurs comme effets indésirables la survenue d’anxiété et de dépression. Au cours d’une étude conduite en laboratoire, des chercheurs ont montré qu’une statine (médicament anticholestérol) exerce un effet négatif sur le fonctionnement de récepteurs à sérotonine, qui redevient normal lorsqu’on ajoute du cholestérol. Ces médicaments pourraient, en plus, diminuer le taux de testostérone.

Enfin, une étude publiée le 7 mai dernier révélait que le risque d’accident vasculaire cérébral hémorragique – qui se produit en cas de rupture d’un vaisseau sanguin au niveau du cerveau – est multiplié par 2,2 chez les femmes présentant un taux de LDL inférieur à 70 mg/dL.

Plus de cholestérol accélère les gains de masse musculaire

De bons apports en cholestérol alimentaire semblent être en mesure d’optimiser les performances physiques. Chez des sportifs engagés dans une programme d’entraînement physique de 12 semaines, le gain de force musculaire est supérieur lorsque l’alimentation est enrichie de 800 mg de cholestérol par jour, par rapport à des apports de 200 et 400 mg. Une équipe de recherche a étudié ce qu’il se passait au niveau du muscle en effectuant des biopsies chez des jeunes sportifs soumis à un régime alimentaire riche ou pauvre en cholestérol (800 mg contre moins de 200 mg).

Ils ont constaté que le taux de synthèse des protéines musculaires, un facteur clef pour la croissance musculaire, était plus élevé chez les membres du premier groupe 22 heures après un entraînement intense. L’action bénéfique du cholestérol pourrait s’expliquer par sa capacité à contribuer aux mécanismes de réparation du muscle suite à l’exercice, notamment en modulant les processus inflammatoires, et à activer des voies de signalisation au sein des cellules (c’est-à-dire la transmission des messages) qui promeuvent la synthèse des protéines musculaires. L’effet est ici comparable à celui en cas d’infection.

Une combinaison de cholestérol et de certaines huiles pourrait augmenter les niveaux de testostérone

Comme le cholestérol est aussi précurseur des hormones sexuelles, certaines personnes pensent que manger plus de cholestérol va augmenter leurs niveaux d’hormones sexuelles (testostérone). Cela n’a pourtant jamais été observé dans les études.

En revanche deschercheurs argentins ont testé les effets d’apports alimentaires en huile de soja, de pépins de raisin, de noix de coco ou d’huile d’olive sur la virilité de rats de laboratoire. Après 60 jours de régime, les rats ayant été nourris avec l’huile de coco ou d’olive ont affiché des taux de testostérone plus élevés que leurs congénères, et leurs testicules pesaient plus lourds.

Selon les chercheurs, ces deux types d’huiles facilitent l’absorption du cholestérol par les cellules de Leydig, qui assurent la fabrication de la testostérone à partir de ce précurseur au sein du testicule. Ce pourrait ainsi être un moyen d’augmenter sa production de testostérone, mais aucune étude humaine n’a encore testé ce mélange.

A lire également :


Références :

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