Le microbiote modifierait l’impact du sel sur la tension artérielle (et inversement)

Modifié le 14 décembre 2023

Temps de lecture : 4 minutes
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Le sel et le microbiote exercent une influence conjointe sur la tension artérielle

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Chacun sait que, pour prévenir l’hypertension artérielle, il faut éviter de manger trop salé. Une nouvelle recherche suggère que le microbiote intestinal joue un rôle dans ce phénomène, par l’intermédiaire de molécules qu’il produit : les acides gras à chaîne courte. 

D’où provient l’excès de sel ?

L’alimentation occidentale est bien souvent trop riche en sel. Souvent par habitude, nous avons parfois la main un peu lourde sur la salière quand nous voulons donner plus de goût à un plat. De plus, certains aliments industriels apportent des quantités importantes de sel, de même que les charcuteries et les fromages.

Le sel de table contient du sodium, un minéral qui favorise l’hypertension, une maladie qui est aussi un facteur de risque pour des troubles cardiovasculaires graves : l’AVC, la crise cardiaque ou l’insuffisance cardiaque. 

Cependant, le mécanisme par lequel le sel augmente la tension artérielle n’est pas totalement compris. Le microbiote intestinal semble jouer un rôle dans ce processus.

Le sel alimentaire modifie la composition du microbiote intestinal

L’alimentation en général a un impact sur la composition de la flore intestinale, et le sel ne fait pas exception. 

Chez la souris, il a été montré que l’activité des bactéries de type lactobacilles (Lactobacillus murinus) décroit en cas d’excès de sel. Inversement, quand des souris nourries avec une alimentation salée reçoivent des bactéries probiotiques avec des lactobacilles, leur pression artérielle baisse. Le sel et le microbiote exercent donc une influence conjointe sur la tension artérielle.

Cet effet du sel sur les lactobacilles est également visible chez l’homme : dans une petite étude où 12 hommes ont mangé salé pendant deux semaines, leur pression artérielle a bien évidemment augmenté, tandis que leurs lactobacilles se sont faites plus rares. 

Les lactobacilles sont des bactéries intestinales sensibles au sel alimentaire

Le sel alimentaire influence la production d’acides gras à chaîne courte

Une nouvelle étude américaine nous éclaire sur le mécanisme qui relie le sel, le microbiote et la pression artérielle. Elle met en évidence l’intervention d’un nouvel acteur essentiel, à savoir les acides gras à chaîne courte (AGCC), des molécules produites par des bactéries intestinales.

Une fois produits par la fermentation microbienne dans l’intestin, les acides gras à chaîne courte traversent la paroi intestinale et rejoignent la circulation sanguine. Il sont alors diffusés dans l’ensemble de l’organisme, ce qui leur permet d’atteindre une grande variété de cellules cibles.

Moins de sel pour plus d’acides gras à chaîne courte

Dans cette étude de l’université d’Augusta, les chercheurs ont voulu savoir quel serait l’impact d’une réduction de la consommation en sel sur les acides gras à chaîne courte chez des patients hypertendus. 145 personnes ont participé à cet essai randomisé contrôlé contre placebo. Les participants avaient une moyenne d’âge de 50,7 ans, un IMC de 29,1 en moyenne, et ils ne prenaient pas de traitement médicamenteux contre l’hypertension artérielle.

Pendant six semaines, les participants devaient réduire leur consommation de sel, en évitant de manger des aliments salés ainsi que d’ajouter du sel à leurs plats. Il s’agissait donc d’une diminution modérée de leur consommation, et non d’un régime sans sel. Certains ont reçu des comprimés de sel et d’autres un placebo.

Les résultats de l’étude montrent que la réduction du sel a permis d’augmenter les niveaux des huit acides gras à chaîne courte que les chercheurs ont dosés dans le sang. Les augmentations significatives concernaient cinq d’entre eux : le 2-méthylbutyrate, le butyrate (ou butanoate), l’hexanoate, l’isobutyrate, et le valérate (ou pentanoate). On observe également une diminution de la pression artérielle, lors de l’augmentation des acides grais à chaîne courte.

Face au sel, les hommes et les femmes ne sont pas égaux

Cependant, les chercheurs ont constaté de grandes différences entre les sexes. En effet cet effet du sel sur les acides gras à chaîne courte n’était significatif que chez les femmes et non chez les hommes, peut-être en raison de différences dans la composition du microbiote. 

D’autres études ont confirmé une différence entre les sexes, concernant l’effet du sel.  D’après certains travaux, la consommation de sel augmente plus la pression artérielle des femmes que des hommes. A cet égard, les femmes semblent donc plus sensibles aux variations de sel alimentaire que les hommes. 

Le microbiote influence la pression artérielle par le biais des AGCC

Des études antérieures réalisées sur l’animal confirment ces résultats. Par exemple, chez la souris, une alimentation salée pendant quatre semaines diminue la composition du microbiote en lactobacilles et la production du butyrate.

Les acides gras à chaîne courte participent au contrôle de la pression artérielle. Dans l’intestin, ils ont un effet anti-inflammatoire sur les cellules épithéliales du côlon et les cellules immunitaires. Mais une fois dans le sang, ils sont transportés vers d’autres organes où ils peuvent se lier à des récepteurs comme :

  • le récepteur Olfr78 qui se trouve dans des artérioles afférentes au niveau des reins. C’est à cet endroit qu’est stockée et sécrétée la rénine, une molécule qui participe au contrôle de la pression artérielle,
  • le récepteur Gpr41, situé au niveau des cellules endothéliales des vaisseaux sanguins.

La liaison des acides gras à chaîne courte avec leurs récepteurs va enclencher une cascade de réactions qui influencent la pression artérielle.

Quelques conseils pour réduire sa consommation de sel

D’après l’OMS, la majorité de la population consomme trop de sel. Nos apports ne devraient pas excéder 5 g par jour, soit 2 g de sodium. A titre de comparaison, la consommation actuelle moyenne se situe entre 9 et 12 g de sel par jour, soit plus du double des recommandations maximales.

Pour limiter sa consommation de sel, il faut avant tout éviter les aliments salés (charcuteries, fromages …) et les aliments ultra-transformés comme les plats cuisinés, les biscuits apéritif, les céréales de petit déjeuner ou les chips. Pour rehausser le goût de vos plats, préférez les épices et les herbes aromatiques ! 

Par ailleurs, l’excès de sodium engendre un déséquilibre de minéraux dans l’organisme. Une complémentation en minéraux antagonistes représente donc une stratégie intéressante pour prévenir l’hypertension artérielle


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