Finastéride contre la calvitie : attention aux effets secondaires

Modifié le 14 décembre 2023

Temps de lecture : 9 minutes
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molécule de finastéride

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Le finastéride est le principe actif de médicaments comme Propécia® ou Proscar® destinés à lutter contre la perte de cheveux et commercialisés depuis une vingtaine d’années. Si cette molécule s’avère efficace dans cette indication, certains utilisateurs semblent manifester certains effets indésirables de façon irréversible.

Un médicament pour lutter contre l’alopécie androgénique

L’alopécie androgénique est la cause la plus commune de perte des cheveux chez l’homme, affectant jusqu’à 50% d’entre eux à l’âge de 50 ans. Le cuir chevelu se dégarnit progressivement, à partir des tempes, du haut du front et du sommet du crâne. Ce phénomène, qui aboutit à une calvitie partielle ou totale, a une forte composante héréditaire.

Chronologie de l'alopécie androgénique
L’alopécie androgénique conduit progressivement à la calvitie

La dihydrotestotérone favorise la chute des cheveux

Les hormones masculines sont à l’œuvre dans ce processus, notamment la dihydrotestostérone (DHT), un androgène très puissant dérivé de la testostérone. Elle freine l’activité du follicule pileux qui permet la croissance des cheveux et précipite leur chute. Chez la plupart des hommes atteints de calvitie, la production de DHT est augmentée.

La transformation de la testostérone en dihydrotestostérone nécessite la présence d’une enzyme, la 5‐α‐réductase. Elle existe sous deux formes, le type 1 présent au niveau des glandes sébacées et le type 2 localisé au niveau des follicules pileux.

dessin schématisant l'action des androgènes au niveau des cheveux
Action des androgènes sur les cheveux chez les personnes génétiquement prédisposées

Bloquer l’enzyme donnant naissance à la DHT pour lutter contre la calvitie

Utiliser un composé capable de bloquer l’activité de cette enzyme pour combattre la calvitie apparaît donc être une option thérapeutique valide. D’autant qu’un médicament de ce type existe : il s’agit du finastéride, un anti-androgène initialement développé pour lutter contre l’hyperplasie bénigne de la prostate, elle aussi sous la dépendance des hormones masculines. Une molécule proche, le dutastéride, dispose d’un mode d’action comparable.

Les effets indésirables du finastéride sur la sphère sexuelle

Molécule de finastéride
Le finastéride bouscule l’équilibre hormonal

Si le finastéride parvient à lutter contre l’alopécie androgénique, son action sur les hormones semble bouleverser l’équilibre de l’organisme et il pourrait être à l’origine d’effets indésirables parfois sévères. 

Ces derniers surviennent paradoxalement plus fréquemment chez les jeunes hommes utilisant la faible dose de ce médicament indiquée pour combattre la calvitie (1mg) que chez les hommes plus âgés recevant la plus forte dose (5mg) contre les problèmes de prostate.

Une vie sexuelle bouleversée par le traitement anti-calvitie

Les effets secondaires concernent en premier lieu la fonction sexuelle. Certains usagers rapportent une diminution voire une perte du désir, des troubles de l’érection, de l’éjaculation, des difficultés à atteindre l’orgasme… Une atrophie des testicules survient chez certains, ainsi qu’un inconfort au niveau de la peau dans la région génitale. Il est parfois si prononcé que les médecins le qualifie de paresthésie, terme désignant des troubles sensitifs au niveau cutané (sensations désagréables de fourmillements, picotements…).

Des effets indésirables persistant à l’arrêt du traitement

Ces manifestations indésirables ne s’envolent pas nécessairement à l’arrêt du médicament, comme l’illustrent les résultats d’une enquête menée auprès de 54 hommes. Les participants ont suivi un traitement à base de 1 et 1,25mg de finastéride sur une durée variable, stoppé au moins 3 mois avant de répondre à un questionnaire détaillé sur les symptômes ressentis avant, pendant ou après le traitement.

graphiques montrant l'impact de la prise de finastéride sur la libido
Impact de la prise de finastéride sur les problèmes de libido

Aucun des participants ne ressentait de problèmes de libido constants avant le traitement, alors qu’ils étaient 24% à en éprouver au cours de celui-ci et encore plus après, où 56% des hommes interviewés étaient concernés.

Des difficultés pour atteindre une érection étaient évoquées par 0% des participants avant le traitement, 17% pendant celui-ci et 61% à son issue. Des tendances similaires étaient observées pour d’autres effets (impression d’un manque de connexion entre le pénis et le cerveau, engourdissement génital…).

Ces cas sont loin d’être isolés et un terme a même été créé par les chercheurs pour désigner ces situations : ils parlent de « syndrome post-finastéride », qui est loin de se limiter à la sphère sexuelle. 

Le finastéride a-t-il un impact négatif sur la fertilité ?

Des préoccupations par rapport aux effets du médicament sur la fertilité masculine ont encouragé des chercheurs à examiner cette question.

Une étude menée auprès de jeunes hommes n’ayant pas de problème de fertilité s’est intéressée aux effets d’un traitement de 48 semaines à base de 1mg de finastéride. Elle n’a pas mis en évidence d’effets négatifs sur le phénomène de production des spermatozoïdes (spermatogenèse), la quantité de sperme et sa concentration, la morphologie ou la motilité des spermatozoïdes. Un suivi pendant 60 semaines après l’arrêt du traitement a confirmé l’absence d’impact négatif

La situation pourrait en revanche être différente en cas de trouble de fertilité. Une analyse menée auprès de 14 hommes dans cette situation, ayant utilisé le médicament pendant 57 mois en moyenne, a montré que la concentration du sperme en spermatozoïdes a été multipliée par 11,6 après l’arrêt du traitement. Dans cette étude, les chercheurs déconseillent de prendre du finastééride en cas d’oligospermie.

Des effets secondaires dépassant la sphère sexuelle

Au-delà de la sexualité, l’organisme de certains hommes paie un lourd tribut à ce traitement anti-calvitie. Tensions musculaires, crampes, tremblements, douleurs articulaires, problèmes de sommeil ou fatigue chronique peuvent survenir, tout comme des troubles psychiques.

Effets indésirables sur le psychisme

Les hommes ayant été traités avec le finastéride peuvent développer des symptômes anxieux ou dépressifs et ressentir des difficultés sur le plan cognitif.

Une analyse menée en 2017 par des chercheurs canadiens a compilé les données recueillies auprès de 93197 hommes de plus de 66 ans ayant reçu un traitement à base de finastéride ou de dutastéride. Elles ont été comparées à celles issues d’un même nombre d’hommes qui n’ont jamais eu ce type de prescriptions.

Les résultats ont montré un risque accru de 88% d’avoir un comportement d’auto-destruction au cours des 18 premiers mois de traitement. Durant cette même période, le risque de dépression est augmenté de 94%, puis de 22% après 18 mois.

jeune homme dépressif assis dans un lieu désaffecté
La finastéride peut provoquer des problèmes psychiques et des comportements auto-destructeurs

Des altérations qui apparaissent à l’IRM

Les perturbations psychiques peuvent se lire au niveau des images cérébrales capturées par IRM chez des hommes souffrant du syndrome post-finastéride. Des anomalies au niveau des circuits cérébraux liés au désir sexuel et à la dépression ont été mises en évidence chez ceux-ci lors de l’exposition à des images érotiques ou non, par rapport aux usagers de ce médicament épargnés par ses effets secondaires et aux hommes jamais traités.

La finastéride pourrait être à l’origine d’idées suicidaires chez certains

L’analyse de 4910 rapports d’effets indésirables chez des utilisateurs de finastéride âgés de 18 à 45 ans a révélé que 39 concernaient la survenue d’idées suicidaires

Six cas de suicide ont été documentés chez des hommes ayant pris du finastéride. Si la responsabilité directe du médicament est impossible à établir, ceux-ci partageaient une histoire commune, caractérisée par l’absence de trouble psychiatrique préalable au traitement et un quotidien impacté par des insomnies et des problèmes sexuels persistant après l’arrêt du finastéride.

L’ANSM s’est mobilisée récemment pour mieux informer les patients de ces risques liés à l’usage du finastéride en cas de calvitie

L’ANSM souhaite alerter les patients et les professionnels de santé sur les risques de troubles psychiatriques et de la fonction sexuelle lors d’un traitement par finastéride. (…) Un courrier est envoyé à l’ensemble des professionnels de santé susceptibles de prescrire, de délivrer ou de suivre des patients traités par finastéride.

ANSM

Le finastéride augmente-t-il le risque de cancer du sein chez l’homme ?

couverture du journal Cancer Medicine , volume 7 , issue 1
Cancer Medicine
volume 7 issue 1

Un lien entre la survenue de cancer du sein chez l’homme et la prise de finastéride est par ailleurs suspecté. Plus d’un million d’habitants des pays nordiques ayant pris du finastéride ont été suivis sur une période allant jusqu’à 15 ans. La fréquence de survenue de cette maladie a été comparée à celle d’un groupe d’hommes n’en ayant jamais pris. 

Un risque accru de cancer du sein de 44% a été mis en évidence avec la prise du médicament, revu à la hausse (60%) quand les données relatives aux hommes suivis sur un temps trop court ont été exclues. Des résultats à prendre cependant avec précautions selon les auteurs et qui devront être consolidées, mais néanmoins préoccupantes. 

L’impact du traitement à base de finastéride sur l’organisme

Les effets indésirables semblent la conséquence de modifications survenant chez certains hommes recevant ce traitement, intervenant à différents niveaux. 

Une quantité accrue de récepteurs aux androgènes

Pour mieux comprendre l’origine du syndrome post-finastéride, des travaux ont été menés chez des animaux mâles exposés à des inhibiteurs de la 5α-réductase. L’étude anatomique de leur appareil génital a révélé des modifications de son architecture, avec une réduction de la taille du muscle lisse et une quantité de collagène augmentée.

Un examen des tissus du prépuce conduit chez des hommes victimes du syndrome post-finastéride a également montré des particularités. Ils présentaient un nombre plus important de récepteurs aux androgènes que des hommes n’ayant jamais reçu de finastéride. 

La testostérone et la DHT se lient à ces récepteurs présents au sein des cellules puis sont transférées vers le noyau de la cellule qui contient l’ADN. Le complexe formé par l’une ou l’autre de ces hormones et ce récepteur est capable de se lier à certaines de ces portions, modulant l’expression de gènes cibles. Une modification de la quantité de récepteurs peut donc entraîner une multitude d’effets par ce biais.

Le contrôle nerveux de l’érection est altéré

Par ailleurs, des chercheurs ont mis en évidence une atteinte de certains circuits nerveux impliqués dans le contrôle de l’érection chez des patients atteints du syndrome post-finastéride et de problèmes d’érection sévères. Des défauts de fonctionnement ont été relevés au niveau du nerf pudendal qui innerve la région pelvienne et participe au mécanisme de l’érection.

schéma illustrant les causes de la dysfonction érectile
La dysfonction érectile peut notamment avoir des causes d’origine neurologique

Des bouleversements dans les taux des hormones stéroïdes pour expliquer les symptômes dépressifs

Pour mieux comprendre l’origine des symptômes dépressifs et anxieux ressentis par les patients souffrant du syndrome post-finastéride, des chercheurs ont analysé le taux des hormones stéroïdes présentes au niveau du cerveau. 

Ils ont découvert des singularités par rapport aux hommes en bonne santé :

  • une baisse du niveau de prégnénolone (l’hormone qui sert de précurseur à l’ensemble des hormones stéroïdiennes), de progestérone et de ses métabolites, d’œstradiol et de dihydrotestostérone ;
  • une augmentation du niveau de déhydroépiandrostérone (DHEA), de testostérone et du 3α-androstanediol (un dérivé de la testostérone).

Les stéroïdes présents au niveau du cerveau jouent un rôle dans la régulation de l’humeur, des processus cognitifs et de nos comportements. L’altération de leurs niveaux consécutive à la prise de finastéride pourrait ainsi expliquer cette dimension du syndrome post-finastéride.

Eviter le finastéride : les alternatives naturelles

Le finastéride pouvant être particulièrement risqué, il semble plus intéressant d’essayer des alternatives.

Bien qu’il n’existe pas de preuves scientifiques de haute qualité sur ces plantes et leur utilisation, certaines études semblent démontrer un certain potentiel. Elles pourraient donc peut-être aider à lutter contre l’alopécie androgénique ; leur avantage majeur étant l’absence d’effets secondaires graves.

L’extrait de palmier de Floride

La plante la mieux étudiée dans ce contexte est le palmier de Floride (Serenoa repens), et plus précisément l’extrait de ses baies.

plantation de palmiers nain en Floride
Le palmier nain est cultivé en Floride,aux Etats-Unis

Une méta-analyse publiée en 2020 a synthétisé les données de 7 études, dont 5 essais cliniques, sur l’usage de cette plante par application sur le cuir chevelu ou en prise orale à des doses de 100 à 320mg.

Selon ses conclusions, le traitement permet d’améliorer la qualité des cheveux de 60% et leur quantité de 27%. Il augmente la densité de cheveux chez 83,3% des patients et stabilise la progression de la maladie pour 52% des personnes atteintes d’alopécie androgénique ou d’une perte de cheveux plus diffuse.

Si on se base sur les études menées dans le cadre de l’hyperplasie de la prostate, où cette plante est employée sous une formule appelée Permixon®, ses effets indésirables sur la sphère sexuelle sont moins fréquents que ceux associés au finastéride.

Un essai clinique a même montré une amélioration de la fonction sexuelle chez les hommes atteints d’hypertrophie de la prostate grâce à cette plante.

L’huile de pépins de courge

Un essai clinique a évalué les effets de l’huile de pépins de courge auprès de 76 hommes souffrant d’alopécie androgénique légère à modérée. Ils ont reçu 400mg par jour de ce traitement naturel ou un placebo pendant 24 semaines.

photo d'une courge, de pépins de courge et d'huile de pépins de courge
L’huile est extraite des pépins de courge et contient des phytostérols

La quantité de cheveux a augmenté de 40% dans le groupe ayant reçu l’huile de pépins de courge, contre 10% dans le groupe placebo. Les effets indésirables n’ont pas été différents entre les deux groupes.

Les composés responsables de l’inhibition de la 5α-réductase dans l’huile de pépins de courge sont les phytostérols.

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