La vitamine D peut-elle engendrer ou aggraver une calcification des artères ?

Modifié le 14 décembre 2023

Temps de lecture : 8 minutes
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La vitamine D gouverne le métabolisme du calcium au sein de notre organisme. Lorsque sa concentration n’est pas adéquate, des dépôts minéraux peuvent se former au niveau de la paroi des vaisseaux sanguins.

L’accumulation de calcium rigidifie les artères

Calcification artérielle aux rayons X
Calcification artérielle aux rayons X

La calcification des artères correspond à l’accumulation de calcium et de phosphate au niveau de la paroi des vaisseaux sanguins. Elle s’épaissit alors et perd de sa souplesse.

Ce processus est à l’œuvre en cas d’athérosclérose : 90% des plaques qui entravent la circulation sanguine présentent des calcifications.

Il survient également dans le cadre de maladies chroniques comme le diabète ou l’insuffisance rénale.

La calcification des artères : un danger pour la santé cardiovasculaire

Cette altération de la structure des vaisseaux sanguins représente un risque pour la santé cardiovasculaire. Une méta-analyse a synthétisé les données relatives à 218080 personnes suivies en moyenne pendant 10 ans. Elle a révélé que la présence de calcifications est associée à un risque trois à quatre fois plus élevé de survenue d’événements cardiovasculaires comme l’infarctus du myocarde ou l’AVC.

Schéma d'un dépôt de calcium dans un vaisseau sanguin

Le déficit en vitamine D favorise la calcification artérielle

Les carences en vitamine D sont courantes dans la population et sont propices à la survenue des calcifications artérielles.

Un lien entre la vitamine D et le risque de calcifications artérielles

Certaines études épidémiologiques ont pu mettre en évidence un lien entre le taux de vitamine D circulant dans l’organisme et la présence de calcifications artérielles.

Les hommes âgés de 40 à 49 ans dont certains vaisseaux sanguins sont calcifiés sont 3 fois plus susceptibles d’être déficients en vitamine D par rapport à ceux qui en sont exempts.

Un risque accru de développer des calcifications au niveau des artères qui alimentent le cœur a par ailleurs été mis en évidence chez les personnes ayant de faibles niveaux sanguins de vitamine D.

prévalence et incidence des calcifications artérielles selon le statut en vitamine D
Le risque de calcification augmente nettement en cas de déficit de vitamine D

Le manque de vitamine D pourrait favoriser la progression de la calcification

Un faible taux de vitamine D dans l’organisme pourrait également aggraver la calcification vasculaire. Un groupe de 302 personnes de plus de 50 ans a été suivi pendant 4 ans. Les participants dont le taux de calcidiol, le précurseur de la forme active de la vitamine D, était compris entre 10 et 20 ng/mL présentaient un risque quatre fois plus important de voir le phénomène s’étendre par rapport à ceux dont le taux était supérieur à 30 ng/mL.

Une alimentation carencée entraîne des calcifications vasculaires chez l’animal

Les études épidémiologiques ne permettent pas d’incriminer formellement la responsabilité du manque de vitamine D dans la survenue de ces calcifications, mais des études menées chez l’animal tendent à le confirmer.

étendue des calcifications artérielles selon le statut en vitamine D chez la souris
Chez la souris, un faible statut en vitamine D est associé à une augmentation de la calcification

Des souris élevées en intérieur, donc privées de la lumière du soleil, ne peuvent obtenir la vitamine D que par leur alimentation. Lorsque celle-ci est déficiente en ce nutriment, les animaux développent des calcifications vasculaires, tandis que de forts apports s’avèrent protecteurs.

Chez les souris carencées, certaines cellules présentes dans la couche interne de la paroi des vaisseaux sanguins subissent une transformation. Elles évoluent en cellules ressemblant aux ostéoblastes, les unités spécialisées des os qui assurent leur calcification. Elles génèrent donc ces formations dans un endroit totalement inapproprié.

L’excès de vitamine D favorise aussi les calcifications artérielles

Si le manque de vitamine D favorise les dépôts de calcium au niveau de la paroi des artères, la situation opposée fait de même.

Chez l’animal, l’excès de vitamine D provoque des calcifications vasculaires

Des travaux de recherche montrent que, sur l’animal, l’administration d’une forte dose de vitamine D peut rapidement conduire à une calcification des vaisseaux sanguins.

Un traitement à base de calcitriol, la forme active de la vitamine D, dispensé à des rats pendant 8 jours provoque une calcification importante de l’aorte. La quantité de calcium et de phosphate augmente drastiquement dans le tissu vasculaire, de 10 à 30 fois par rapport à la normale.

Dès l’arrêt du traitement, le phénomène régresse. En l’espace de 9 semaines, la quantité de dépôts calciques diminue de 75% sous l’action de cellules immunitaires qui les détruisent.

Une absorption augmentée de calcium et de phosphate

couverture de The Journal Of Clinical Endocrinology & Metabolism

Cette situation s’explique en partie par l’un des rôles essentiels de la vitamine D, chargée de faciliter l’absorption du calcium et du phosphate au niveau de l’intestin. C’est de cette façon qu’elle favorise la santé osseuse et qu’elle prévient le rachitisme chez les enfants.

Lorsque la vitamine D est présente en excès, l’augmentation du niveau de ces minéraux dans le sang atteint des niveaux qui deviennent néfastes. L’hypercalcémie et l’hyperphosphatémie qui en découlent favorisent la survenue des calcifications au niveau des tissus mous de l’organisme, dont les vaisseaux sanguins.

La société d’Endocrinologie définit l’hypervitaminose D par un taux sanguin de 25-hydroxyvitamine D supérieur à 100 ng/mL (ou 250 nmol/L) et d’intoxication à la vitamine D quand il dépasse les 150 ng/mL (ou 375 nmol/L). 

Un déséquilibre entre les facteurs pro et anti-calcification

Les études expérimentales ont révélé d’autres mécanismes d’action par lesquels l’excès de vitamine D promeut les calcifications vasculaires.

Le calcitriol bloque l’action d’un composé, le peptide lié à l’hormone parathyroïde (PTHrP), qui s’oppose à la calcification des cellules vasculaires.

Il promeut par ailleurs la production des métalloprotéinases, des enzymes qui encouragent au contraire ce processus.

représentation 3D du peptide lié à l'hormone parathyroïde ou PTHrP
Peptide lié à l’hormone parathyroïde ou PTHrP

Ni trop, ni trop peu de vitamine D pour éviter les calcifications

Il apparaît donc que des taux trop bas ou trop élevés de vitamine D favorisent tous deux l’installation de calcifications vasculaires.

Un taux équilibré de vitamine D est nécessaire à la santé vasculaire

Ce phénomène a été mis en lumière chez des enfants souffrant d’une maladie rénale. Chez ceux-ci, la dernière étape de transformation de la vitamine D en forme active qui se déroule principalement au niveau des reins est compromise. Le recours à la supplémentation en calcitriol s’impose donc.

Des chercheurs ont étudié l’impact du niveau de vitamine D dans l’organisme de ces enfants sur leur santé vasculaire. Ils ont constaté que le niveau de calcifications vasculaires et l’épaisseur de leurs carotides (les artères du cou) étaient plus importants à la fois chez ceux qui présentaient des niveaux trop bas de calcitriol (inférieurs à 40 pmol/L) et chez ceux en présentant de trop élevés (supérieurs à 150 pmol/L).

Chez les jeunes malades dont le taux de vitamine D active dans le sang s’inscrivait dans la norme, l’épaisseur de la carotide était en revanche comparable à celle d’enfants en bonne santé.

relation entre les calcifications artérielles et le statut en vitamine D
Le plus faible niveau de calcification est atteint avec un dosage précis de vitamine D

Une élévation des niveaux d’inflammation en cas de carence en vitamine D

Chez les enfants carencés, les niveaux de protéine C-réactive étaient élevés, traduisant un fort degré d’inflammation. La présence excessive de composés inflammatoires comme le TNF-α, l’interleukine-1 bêta ou l’interleukine-6 contribue à endommager le tissu qui tapisse l’intérieur des vaisseaux sanguins. Ce phénomène constitue une amorce au mécanisme de calcification. La capacité de la vitamine D à la réprimer s’explique ainsi notamment par ses effets anti-inflammatoires.

La dose idéale de vitamine D

Pour disposer des niveaux protecteurs de vitamine D en termes de santé vasculaire, il est ainsi légitime de s’interroger sur le dosage idéal pour lequel opter dans le cadre d’une supplémentation.

L’impact d’une supplémentation longue sur les calcifications artérielles

Une étude très récente, conduite par des chercheurs de l’université de Calgary au Canada, montre qu’une supplémentation au long court, même à la dose maximale quotidienne à ne pas dépasser (10000 UI), ne représente pas de danger de calcifications artérielles.

L’équipe a analysé les données recueillies auprès de 302 personnes âgées de 55 à 70 ans, supplémentées avec des doses variables de vitamine D : 400, 4000 ou 10000 UI pendant trois ans. Le degré de calcification au niveau de l’artère du tibia a été évalué avant la supplémentation et suivi régulièrement au cours de ces trois années.

Avant le début de la supplémentation, 85 participants (soit 28% du groupe) présentaient des calcifications. Chez ceux-ci, la quantité de dépôts a progressivement augmenté au fil des mois, mais sans différence selon le niveau de supplémentation en vitamine D. Autrement dit, le fort dosage n’a pas accentué les calcifications artérielles de façon plus marquée que le très faible dosage. Aucun des autres participants n’a développé de calcifications artérielles au cours de l’étude.

Globalement, des doses de vitamine D jusqu’à 10000 UI ne semblent pas favoriser la survenue du phénomène de calcification. Chez les personnes qui en sont déjà atteintes, elles n’ont pas non plus apporté de bénéfices dans le cadre de cette étude.

La supplémentation en vitamine D améliore la souplesse des artères

La situation est très différente chez les personnes au déficit avéré en vitamine D. Dans ce cas, la supplémentation améliore la souplesse des artères, et ce de façon d’autant plus marquée que la dose reçue est importante.

Relation entre le dosage de complémentation en vitamine D et le gain de souplesse des artères
En cas de déficit en vitamine D, les bienfaits conférés par la complémentation augmentent avec la dose

L’étude qui a mis en évidence cet effet bénéfique a été menée auprès de 70 Afro-Américains en surpoids ou obèses âgés de 13 à 45 ans et présentant une rigidité artérielle. Les déficits en vitamine D sont courants dans cette population ; en effet, la mélanine qui colore la peau limite les capacités de production de la vitamine D lors de l’exposition au soleil, et la quantité importante de masse grasse séquestre cette vitamine liposoluble.

Les participants ont reçu des doses variables de vitamine D de 600, 2000 ou 4000 UI par jour pendant 16 semaines.

La dose la plus élevée a permis de réduire la rigidité artérielle de 10,4% en seulement quatre mois.  Avec 2000 UI, la baisse n’a atteint que 2%. La situation a continué à s’aggraver dans le groupe recevant 600 UI avec une augmentation de la rigidité artérielle de 1% et dans le groupe placebo où elle a progressé de 2,3%.

La fourchette idéale de complémentation en vitamine D

Disposer d’un statut équilibré en vitamine D apparaît donc primordial pour entretenir sa santé vasculaire. Les doses officiellement recommandées, de l’ordre de quelques centaines d’UI par jour, sont souvent insuffisantes pour atteindre un taux sanguin idéal et il est préférable de calculer plus précisément son besoin en vitamine D en fonction de son profil.

Si des calcifications artérielles sont déjà installées, il peut être intéressant de coupler la prise de vitamine D à une supplémentation en vitamine K2.

D’après les données issues de l’essai clinique précédemment évoqué, la supplémentation en vitamine D ne représente pas de danger par rapport aux calcifications tant qu’elle reste en dessous de 10000 UI par jour.

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