Mythe : les morphotypes en musculation

Modifié le 14 décembre 2023

Temps de lecture : 4 minutes
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comparaison entre els différents morphotypes en musculation

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Il existe un concept largement utilisé en musculation et bizarrement, uniquement en musculation, c’est celui  des morphotypes. Les morphotypes permettraient de classer les individus en fonction de leurs caractéristiques physiques qui seraient d’origine génétique et desquelles découleraient des capacités plus ou moins grandes à devenir musclé ou à ne pas avoir trop de graisse corporelle.

Il existerait ainsi trois morphotypes :

  • L’endomorphe : l’individu a une ossature fine, il prend facilement du poids, des hanches larges, un aspect rond, des épaules étroites, il a tendance à prendre facilement du gras.
  • Le mésomorphe : l’individu a une ossature large, un visage aux traits marqués, naturellement musclé, des épaules larges, une ossature épaisse.
  • L’ectomorphe : l’individu a une ossature fine, il est mince, peu musclé et prend difficilement du poids, il a des épaules et un bassin étroits.

Les endomorphes auraient un potentiel « moyen » pour la musculation, les mésomorphes seraient naturellement très doués et les ectomorphes seraient naturellement mauvais. Un tel déterminisme laisse pantois ! Et pour cause ! Ce typage n’a rien de scientifique. Il a été créé dans les années 40 par William Sheldon, un psychologue Américain, d’après la simple observation de photos…Un peu comme si un boulanger proposait un programme pour voyager dans l’espace.

Ce typage a été exagérément repris dans le domaine de la musculation alors qu’aucun autre domaine scientifique ou médical ne s’y réfère aujourd’hui, ce qui se comprend puisque scientifiquement cette théorie ne repose sur aucune logique. Il n’existe d’ailleurs aucune étude scientifique qui montre que ces morphotypes existent, au contraire les études actuelles montrent le contraire (voir plus bas).

Depuis, d’autres ont voulu tenter leur chance en créant des typages morphologiques afin de donner des conseils personnalisés plutôt que de simples généralités, que ce soit dans le cadre d’un régime alimentaire ou d’un entraînement physique. Citons par exemple les morphotypes du docteur Delabos, qui, lui, distingue cinq catégories : le morphotype sablier, Chéops, monastique, Schwarzy et le morphotype tronc d’arbre qui n’ont bien sûr pas beaucoup plus de justifications.

À ce stade, la première chose à faire est d’oublier tout ce que vous avez pu lire ou entendre sur ces classifications. Elles sont fausses et ne font que vous induire en erreur : elles vous imposent l’idée que vous êtes ou n’êtes pas fait pour votre sport. En réalité, même s’il est vrai que certaines caractéristiques physiques sont figées, elles ne le sont pas autant que vous le croyez. Pour illustrer ce point, je vous laisse constater l’évolution de Rudy Coia. À ces débuts il pouvait être classé en tant qu’ectomorphe. Mais aujourd’hui on pourrait le dire mésomorphe !

Morphotype de rudy coïa

Quelle que soit votre constitution, quel que soit votre profil aujourd’hui, il y a toujours une possibilité de changement, une marge de progression. Il est vrai que certaines personnes sont génétiquement prédisposées à faire plus de muscle que d’autres, mais cela n’a rien à voir avec la largeur initiale de votre taille ou de vos épaules. De plus, en ce qui concerne la capacité à stocker des graisses corporelles, toutes les études montrent que celle-ci est beaucoup plus influencée par… L’alimentation que par les gènes.

 L’alimentation influence les gènes

Dans une récente étude qui a porté sur plus de 36 000 adultes de différentes origines avec un recul d’environ 25 ans, une équipe internationale de chercheurs a montré que l’association entre les gènes de l’obésité et le risque d’obésité n’était pas toujours vrai : il dépend de l’alimentation des individus.

Ainsi, parmi les personnes qui ont un gène de l’obésité, seuls ceux qui ont une alimentation riche en graisses, et en particulier en graisses saturées, deviennent obèses. Autrement dit : l’alimentation influence les gènes.

Cet aspect des choses est encore mal connu et on se plait plutôt à dire communément que l’obésité est génétique. Pourtant ces recherches en confirment des dizaines d’autres plus anciennes. En 2012 des chercheurs de Harvard ont ainsi montré que plus on consomme de sodas, plus les gènes de l’obésité s’activent et contribuent au surpoids. Une consommation quotidienne de sodas multiplierait le risque d’obésité par 5.

L’activité physique aussi semble influencer ces gènes  : une heure de marche quotidienne réduit l’influence génétique de l’obésité à hauteur de 50%. Inversement, être sédentaire et regarder la télévision 4 heures par jour augmente cette influence de 50%.

Ainsi, même une personne ayant été mince pendant toute son enfance peut devenir obèse. Le mécanisme identifié par les chercheurs est le suivant : au début, en mangeant régulièrement des aliments “junk foods”, notre poids corporel ne change pas. Avec le temps, cette alimentation modifie la flore bactérienne intestinale : des bactéries apportant à la famille des firmicutes prolifèrent anormalement. Ces bactéries sont responsables de l’absorption des calories des aliments par notre organisme : notre corps se met à absorber de plus en plus de calories même en ne mangeant pas plus, on commence donc à grossir. Une fois la flore bactérienne de firmicutes bien implantée, le gain de poids (et surtout de graisses) s’accélère et si l’alimentation ne change pas, peut mener à un surpoids important ou à l’obésité. L’alimentation est donc le paramètre le plus important bien loin devant la génétique.

En conclusion, les morphotypes n’existent pas.

Références : Sungshim Lani Park etal. Association of the FTO Obesity Risk Variant rs8050136 With Percentage of Energy Intake From Fat in Multiple Racial/Ethnic Populations: The PAGE Study Am. J. Epidemiol. first published online July 2, 2013.

Dolores Corella et al. A High Intake of Saturated Fatty Acids Strengthens the Association between the Fat Mass and Obesity-Associated Gene and BMI. J. Nutr. 2011 141: 12 2219-2225.

Qi Q, Chu AY, Kang JH, Jensen MK, Curhan GC, Pasquale LR, Ridker PM, Hunter DJ, Willett WC, Rimm EB, Chasman DI, Hu FB, Qi L. Sugar-Sweetened Beverages and Genetic Risk of Obesity. N Engl J Med. 2012 Sep 21.

Ivana Semova, Juliana D. Carten, Jesse Stombaugh, Lantz C. Mackey, Rob Knight, Steven A. Farber, John F. Rawls. Microbiota Regulate Intestinal Absorption and Metabolism of Fatty Acids in the Zebrafish. Cell Host & Microbe, 2012; 12 (3): 277.

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