Le fructose ferait grossir et endommagerait le foie

Modifié le 14 décembre 2023

Temps de lecture : 6 minutes
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fructose liquide qui tombe dans une cuillère à soupe

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Le fructose est un sucre simple (comme le glucose) utilisé de plus en plus fréquemment par les industriels car c’est lui qui donne un gout sucré aux aliments. On en trouve dans le sucre de table/complet/roux/de canne à hauteur de 50% et dans tous les produits alimentaires sous la mention “sirop de glucose-fructose” (apport variant de 55 à 95% du produit). Les sodas, biscuits et autres sucreries en sont riches. On en trouve également dans des produits naturels comme le miel ou les fruits.
Les effets du fructose sur la santé sont le sujet de nombreuses expériences scientifiques depuis quelques années. Actuellement les recherches sont suffisamment claires pour connaitre les effets néfastes du fructose dans le corps humain mais ils dépendent d’un certain nombre de facteurs que je vais essayer d’exposer ici brièvement. Mais avant, laissez-moi vous racontez les deux expériences inédites qu’ont menées des chercheurs de l’université de médecine Wake Forest en Caroline du Nord aux Etats-Unis.

 Le fructose rend les singes obèses et diabétiques

Il existe plusieurs difficultés lorsqu’on veut connaitre les effets du fructose “dans la vraie vie”. L’une d’elle est la difficulté de contrôler précisément l’alimentation d’un humain au cours de longues périodes pour étudier les liens avec son état de santé. En effet, personne n’est prêt à suivre un régime alimentaire à la lettre pendant plusieurs années sans faire le moindre écart juste pour les beaux yeux des scientifiques. Dans ce genre de cas on a souvent recours aux modèles animaux : une souris en cage par exemple. Le problème c’est que l’homme n’est pas une souris ! Son métabolisme énergétique est très différent du nôtre. A tel point que les chercheurs considèrent que ce modèle n’est pas utilisable pour pouvoir étudier les effets du fructose (raison de plus pour vous méfier lorsqu’on vous vante les bienfaits d’un complément alimentaire étudié sur un groupe de souris…). Heureusement, grâce à des chercheurs américains on sait qu’un animal a un métabolisme très proche du notre, c’est le singe; et plus particulièrement le macaque rhésus (1).
L’équipe du Dr Kavanagh travaille principalement sur ces singes, les macaques rhésus. Leur première étude visant à observer les effets du fructose avait suivi deux groupes de macaques qui étaient autorisés à manger à volonté, pendant 7 ans.  Le premier groupe avait accès à des aliments pauvres en graisses et pauvres en fructose alors que le deuxième groupe avait accès à des aliments pauvres en graisse mais riches en fructose, d’une manière comparable à ce que consomment régulièrement certains citoyens américains ou français.
Résultat : au bout de 7 ans, les singes qui avaient mangé beaucoup de fructose étaient 50% plus gros que les autres et avaient développé 3 fois plus de diabète de type 2.
On a souvent tendance à croire que les singes se nourrissent uniquement de fruits et qu’ils ne tombent jamais malades. Malheureusement, comme votre chien ou votre chat, un singe peut tomber malade, développer un diabète ou de l’arthrose, en particulier à cause de sa mauvaise alimentation. Le régime alimentaire naturel du macaque est constitué de bourgeons, de graines, de racines, de fruits et de beaucoup d’insectes (qui sont très riches en protéines).
Après ces résultats les chercheurs se sont posés la question suivante : “Est-ce le fructose qui fait grossir et rend diabétique ou est-ce simplement parce que les singes ont trop mangé, à volonté ?”

Le fructose rend malade et détruit le foie

Dans une deuxième étude qui vient d’être publiée dans la prestigieuse revue médicale The American Journal of Clinical Nutrition, le Dr Kavanagh et son équipe ont sélectionné 10 singes en bonne santé d’âge moyen qui ont été divisés en deux groupes : l’un a reçu une alimentation contenant 24% de fructose et l’autre a reçu une alimentation contenant 0,5% de fructose. Dans les deux cas, les apports totaux en calories, protéines, glucides et lipides étaient identiques. Seul changeait le type d’aliments. Autrement dit, l’objectif était de voir les effets du fructose seul.
Au bout de 6 semaines (l’équivalent d’une étude de 3 mois chez l’homme), les chercheurs constatent que les deux groupes ont le même poids corporel mais que le groupe qui a mangé beaucoup de fructose a un foie fatigué et entouré de graisses (2).
En effectuant des analyses de sang et des prélèvements bactériens, les chercheurs ont constaté que l’alimentation riche en fructose provoquait une fuite des bactéries intestinales vers le sang et vers le foie. En d’autres termes cela signifie que le fructose rend l’intestin perméable, ce qui est une véritable catastrophe pour la santé (pour plus d’informations à ce sujet, consulter “Gluten, comment le blé moderne nous intoxique“)
Cette étude nous rappelle aussi que la qualité de l’alimentation influence grandement notre état de santé (et notre composition corporelle).

L’alimentation ne contient pas autant de fructose

En lisant ces résultats vous pourriez être tenté d’éviter le fructose à tout prix. Mais ce n’est pas si simple ! En effet, les études montrent que la consommation régulière de fruits (riches en fructose) est bénéfique pour la santé. Pire encore, on n’est actuellement incapable de savoir à partir de combien de fruits par jour l’apport en fructose devient dangereux : plus vous mangez de fruits moins vous avez de maladies cardiovasculaires (3). En revanche quand on observe les apports en fructose issus des produits alimentaires courants, des effets néfastes apparaissent clairement dès 100 gr par jour (4). D’où vient donc ce paradoxe ?
Pour le savoir il faut examiner en détail le métabolisme du fructose chez l’homme : après digestion il est orienté vers le foie où il sera stocké ou utilisé. A priori, rien d’extraordinaire. Sauf que lorsque les apports en fructose sont brusquement importants, la capacité du foie à traiter ce fructose est dépassée, il va alors être rapidement transformé en graisses, responsables des effets observés chez les singes et supposés chez l’homme de diabète et de surpoids (5).
Lorsqu’on mange des fruits, l’absorption du fructose au niveau de l’intestin est nettement ralentie par les fibres et la structure générale du fruit. De plus, un fruit ne contient que 10 gr de fructose, en moyenne. Ainsi, il n’est pas possible de dépasser les capacités du foie à métaboliser le fructose des fruits et donc impossible de devenir diabétique en mangeant beaucoup de fruits si le reste de l’alimentation est bon.
Le danger vient véritablement des apports de fructose ajoutés dans l’alimentation, c’est-à-dire sous des formes qui ne sont pas naturelles. Il faut donc fuir les sodas, biscuits, sucres en poudre mais aussi les jus de fruits qui ne ressemblent plus du tout à des fruits et dont le fructose est digéré très rapidement.

Quelle quantité de fruits pour le sportif ?

Pour les pratiquants de musculation, le souci de bien faire et la maitrise du corps peut amener à se poser la question : combien de fruits faut-il manger idéalement lors d’une période de prise de muscles/de force ou d’un régime/sèche ? Et est-il bénéfique de ne manger aucun fruit ?
Les effets du fructose dans l’organisme ne sont pas les mêmes en période de prise de masse qu’en période de régime : au régime le glycogène hépatique a tendance à être bas et dans ce cas la consommation de fructose permettra de remplir le foie, ce qui est bénéfique pour la résistance de l’organisme en général et pour le métabolisme général. En revanche en prise de masse musculaire le fructose en excès peut ne pas être métabolisé correctement et sera plus facilement converti en graisses.

  • Premier conseil : ne faites jamais de prise de masse ! Faites des prises de muscles !
  • Deuxième conseil : Mangez toujours entre 1 et 2 fruits par jour au régime mais pas plus. Cette dose de fructose ajoutée à celle des légumes et des aliments est dite “catalytique” (6). Elle permet d’améliorer la sensibilité à l’insuline. Une meilleure sensibilité à l’insuline place l’organisme dans des conditions plus favorables pour préserver la masse musculaire et perdre la graisse abdominale. De plus, le fructose au régime permettra de préserver le fonctionnement normal du foie, un organe très important pour la santé et la performance.

Références : (1) Bremer AA, Stanhope KL, Graham JL, Cummings BP, Wang W, Saville BR, Havel PJ. Fructose-fed rhesus monkeys: a nonhuman primate model of insulin resistance, metabolic syndrome, and type 2 diabetes. Clin Transl Sci. 2011 Aug;4(4):243-52.
(2) Kylie Kavanagh, Ashley T Wylie, Kelly L Tucker, Timothy J Hamp, Raad Z Gharaibeh, Anthony A Fodor, John M Cullen. Dietary fructose induces endotoxemia and hepatic injury in calorically controlled primates. Am J Clin Nutr 2013 ajcn.057331.
 (3) He FJ, Nowson CA, Lucas M, MacGregor GA. Increased consumption of fruit
and vegetables is related to a reduced risk of coronary heart disease: metaanalysis
of cohort studies. J Hum Hypertens. 2007;21(9):717-728.
(4) Livesey G, Taylor R. Fructose consumption and consequences for glycation, plasma triacylglycerol, and body weight: meta-analyses and meta-regression models of intervention studies. Am J Clin Nutr. 2008 Nov;88(5):1419-37.
(5) Ludwig DS. Examining the health effects of fructose. JAMA. 2013 Jul 3;310(1):33-4.
(6) Sievenpiper JL, Chiavaroli L, de Souza RJ, Mirrahimi A, Cozma AI, Ha V, Wang DD, Yu ME, Carleton AJ, Beyene J, Di Buono M, Jenkins AL, Leiter LA, Wolever TM, Kendall CW, Jenkins DJ. ‘Catalytic’ doses of fructose may benefit glycaemic control without harming cardiometabolic risk factors: a small meta-analysis of randomised controlled feeding trials. Br J Nutr. 2012 Aug;108(3):418-23.

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