Quelles sont les approches complémentaires contre Helicobacter pylori ?
Modifié le 19 décembre 2024
Temps de lecture : 6 minutes
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L’infection par la bactérie Helicobacter pylori est très courante et concernerait jusqu’à 30 % des adultes en France. Sa présence conduit à une inflammation de la muqueuse de l’estomac et à une altération de la production d’acide. Si un traitement médicamenteux associant plusieurs antibiotiques et un antiacide est souvent indispensable pour l’éradiquer, plusieurs remèdes naturels peuvent être utilisés en parallèle.
Un microbe en terrain hostile
H. pylori se distingue des autres microbes par sa capacité à survivre et se développer dans le milieu très hostile de l’estomac. Pour bénéficier de conditions plus favorables, elle va cependant le rendre un peu moins acide. Pour y parvenir :
- elle génère de l’uréase, une enzyme qui transforme l’urée en ammoniac, neutralisant ainsi l’acide autour d’elle ;
- elle produit des composés qui bloquent la sécrétion d’acide gastrique : des cytokines comme l’ interleukine-1β ;
- elle entrave le fonctionnement des pompes à protons présentes au niveau des cellules pariétales et indispensables pour la sécrétion de l’acide chlorhydrique. De plus, elle agit sur le gène qui assure leur fabrication, réduisant ainsi leur nombre.
Les traitements classiques associent 3 ou 4 molécules
Se débarrasser de la bactérie est un véritable défi, dans la mesure où de nombreuses souches ont développé des résistances aux antibiotiques utilisés pour l’éradiquer. Le traitement classique repose généralement :
- sur une trithérapie, associant deux antibiotiques et un médicament inhibiteur de la pompe à proton (IPP) pour faciliter l’action de ceux-ci ;
- voire une quadrithérapie, plus efficace. Elle consiste soit en l’administration de trois antibiotiques (par exemple amoxicilline, clarithromycine et métronidazole) et d’un IPP , soit sur deux antibiotiques, un IPP et un sel de bismuth.
Selon le protocole retenu, le traitement dure 10 ou 14 jours. Ces traitements ne sont pas infaillibles, leur taux d’efficacité est estimé au maximum entre 80 et 90 %.
L’enjeu de son élimination est de taille : chez une minorité de patients, la bactérie entraîne la formation d’ulcères et de reflux gastrique. À long terme, certains chercheurs pensent qu’elle peut donner le cancer de l’estomac. Et même si l’éradication de ce microbe pathogène ne permet pas de restaurer parfaitement la muqueuse de l’estomac, elle permet au moins de réacidifier l’organe, ce qui est crucial pour la santé globale et le bien-être digestif.
Les solutions naturelles contre Helicobacter pylori
Une grande variété de plantes disposent de propriétés contre la bactérie, l’empêchant de coloniser la muqueuse de l’estomac ou réduisant les populations déjà installées.
Le jus de pommes de terre
Le jus de pommes de terre crues a toujours été un remède traditionnel contre les problèmes d’estomac, et notamment les infections bactériennes avec reflux gastrique. S’il est utilisé de longue date, sa validation par des études scientifiques est récente.
Une toxicité naturelle transformée en atout
Son efficacité a été le sujet de thèse d’un jeune étudiant en médecine de l’université de Manchester (Angleterre). Dans son étude, il explique que la pomme de terre contient de la solanine, un saponine de la famille des glyco-alcaloïdes, qui est toxique.
La toxicité de la pomme de terre sur la santé, notamment au niveau intestinal, a été bien développée dans mon livre Paléo Nutrition. Mais dans le cas d’Helicobacter Pylori, cette toxicité peut être mise à profit car elle peut avoir une activité antibactérienne.
Un extrait efficace contre les souches résistantes
Dans ses travaux, le jeune chercheur démontre que le jus de pommes de terre crues est capable de tuer 100% de la bactérie dans des cultures cellulaires. Il indique également que les pommes de terre fraîches sont plus efficaces que les vieilles pommes de terre. Plus intéressant encore : le chercheur a aussi découvert que l’extrait de pommes de terre est efficace contre la bactérie même quand celle-ci est résistante aux antibiotiques !
Marche à suivre et précautions d’utilisation
Le jus de pommes de terre cru se prend dans un verre à la fin de chaque repas. La durée de traitement recommandée est de 10 à 30 jours. Passé ce délai et une fois les symptômes disparus, il est recommandé de stopper le jus de pommes de terre afin d’éviter les effets néfastes pour la santé intestinale des saponines.
Les anthocyanes des baies
Des chercheurs américains ont testé en laboratoire les effets de différentes baies contre la bactérie. Ils ont conclu que les extraits de framboise, fraise, canneberge, sureau, myrtille ou airelle, des petits fruits riches en anthocyanes aux propriétés antioxydantes, sont efficaces et peuvent améliorer les effets de l’antibiotique clarithromycine. L’efficacité maximale est obtenue lorsque ces baies sont mélangées dans une même préparation (Optiberry®).
Des essais cliniques ont par ailleurs été menés avec du jus de canneberges (ou cranberries), réputé efficace en cas d’infection urinaire (cystite). Voici leurs résultats :
- dans une étude chinoise, la prise de deux fois 250 ml par jour pendant 90 jours élimine la bactérie chez 14 personnes sur 97 (dans le groupe placebo, 5 sur 92 sont devenues négatives à la bactérie spontanément) ;
- des chercheurs israéliens ont montré des bénéfices, mais uniquement chez les femmes, à coupler une trithérapie (oméprazole, amoxicilline, clarithromycine) à 500 ml de ce jus (en deux prises quotidiennes) pour éradiquer la bactérie. Le taux d’élimination est passé de 86,8 % avec la trithérapie seule à 95,2 % avec la consommation conjointe du jus de cranberries ;
- des chercheurs chiliens ont testé les effets de l’administration de 200 ml de jus de canneberge et d’un probiotique (Lactobacillus johnsonii), seuls ou en combinaison, chez des enfants. Le jus a permis d’éradiquer la bactérie chez 16,9 % des participants, le probiotique chez 14,9 % et la combinaison des deux chez 22,9%. Bien que ce dernier chiffre soit supérieur à celui obtenu avec les traitements individuels, les auteurs n’ont pas conclu à un effet synergique de l’association des deux traitements, car d’un point de vue statistique il n’y avait pas de différence entre les groupes.
L’efficacité du jus de canneberge s’explique en partie par son action antiadhésive, qui entrave la capacité de la bactérie à se fixer et à coloniser l’estomac.
D’autres composés végétaux peuvent agir de même : l’algue Cladosiphon fucoidan, un extrait de fruit d’okra (Abelmoschus esculentus), les graines de cassis, le ginseng ou l’Armoise capillaire (Artemisia capillaris).
Les composés phénoliques de l’huile d’olive
En laboratoire, l’huile d’olive a démontré sa capacité à inhiber le développement de H. pylori grâce à ses composés phénoliques. Des chercheurs espagnols ont mené deux études pilotes chez l’homme :
- 30 personnes infectées par la bactérie ont ingéré 30 g d’huile d’olive, pendant deux périodes (deux fois 14 jours avec une pause de 1 mois). À la fin de l’étude, 12 personnes ne présentaient plus les signes de l’infection ;
- 30 personnes ont reçu 30 g de différentes huiles d’olive pendant 14 jours. Seulement 5 personnes (11%) ont été libérées de leur infection 1 à 3 jours suivant la dernière prise.
Les autres plantes aux vertus anti-Helicobacter
De nombreuses autres plantes sont dotées de vertus contre la bactérie. Parmi les plus prometteuses, on trouve par exemple le mastic de chios, une espèce de pistachier présente en Grèce (Pistacia lentiscus) et son huile essentielle. Un petit essai clinique a été conduit par des chercheurs grecs : l’administration de 1,05 g de mastic pur par jour pendant 14 j a conduit à une éradication de la bactérie chez 5 patients sur 13.
Une étude menée en Arabie Saoudite a montré que l’administration de 2 g de graines de cumin noir (Nigella sativa) couplée à un IPP a une efficacité comparable à la trithérapie (clarithromycine, amoxicilline et oméprazole) pour éradiquer la bactérie.

Les graines de cumin noir sont dotées de propriétés antibactériennes contre H. pylori.
Le brocoli contient un composé aux vertus antibactériennes, le sulforaphane. Dans le cadre d’un essai clinique mené au Japon, 70 g de pousses de brocoli ont été consommées chaque jour pendant 8 semaines. À l’issue de cette période, 8 participants sur 25 (32%) étaient testés négatifs à la bactérie. Cependant, 6 mois après, seuls 2 l’étaient restés, montrant que l’intervention avait permis de réduire le degré de colonisation par la bactérie, plutôt que conduit à son élimination totale.
L’hydne hérisson (Hericium erinaceus), un champignon utilisé en médecine traditionnelle chinoise, a montré son efficacité lors d’une étude menée auprès de 25 patients. Il a permis de rendre indétectable l’infection chez 89,5%, là où les huiles essentielles administrées à une partie des participants n’ont été efficaces que chez 33,3% d’entre eux.
La lactoferrine, une défense naturelle contre la bactérie
La lactoferrine, une protéine naturellement produite par notre organisme, présente par exemple dans le lait maternel, est dotée de propriétés antimicrobiennes. Plusieurs études se sont intéressées à son potentiel thérapeutique en cas d’infection contre H. pylori, et une analyse a synthétisé les données recueillies au cours de 9 de ces essais cliniques. Ainsi, une supplémentation en lactoferrine en parallèle du traitement classique :
- facilite l’élimination de la bactérie et permet au taux d’éradication de passer de 74,44 % à 86,57 % ;
- diminue la fréquence des effets indésirables, les nausées notamment, de 16,28 % à 9,05 %.
Des probiotiques en renfort
La piste de l’administration de probiotiques, ces bactéries alliées pour notre santé, pour combattre l’infection par H. pylori a été explorée lors de nombreux travaux. Une méta-analyse conduite par des chercheurs chinois a compilé les données de 13 essais cliniques menés auprès de 2 306 personnes.
Elle a mis en évidence que la prise de probiotiques facilite l’éradication de la bactérie lorsqu’elle est couplée aux traitements classiques, aussi bien chez les adultes que chez les enfants. De plus, elle réduit les effets indésirables des antibiotiques, comme les nausées et vomissements, la diarrhée ou la constipation.
Les compléments alimentaires contenant plusieurs souches sont plus efficaces que ceux élaborés à partir d’une souche seule de Lactobacillus. La prise de Lactobacillus reuteri seule, une pratique populaire chez les personnes contaminées par la bactérie, n’a que peu de chances d’aboutir à une éradication complète de la bactérie.
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