Nouvelles révélations sur le lien entre flore intestinale et anxiété

Modifié le 14 décembre 2023

Temps de lecture : 3 minutes
()
ventre de jeune femme avec un smiley souriant dessiné sur un papier

julienvenesson.fr ce n’est pas que des formations professionnelles en nutrition, la sélection des meilleurs livres et des consultations avec des nutritionnistes, c’est aussi les réponses à vos questions dans les articles du blog. Bonne lecture !

Les personnes touchées par des maladies intestinales se sentent souvent plus fragiles psychologiquement. On a longtemps pensé que cela était lié à la peur d’être malade ou d’accepter son état mais de nouvelle recherches montrent qu’au contraire, ce sont les problèmes intestinaux eux-mêmes qui modifient et fragilisent l’humeur, notamment en augmentant l’anxiété.

De plus, de récentes recherches commencent à pointer du doigt le mécanisme d’action des probiotiques (les “bonnes bactéries” qu’on trouve notamment en compléments alimentaires) sur notre cerveau.

Une action sur la flore intestinale soulage l’anxiété

Dans un article paru dans la revue General Psychiatry, des chercheurs de l’université Jiao-tong, à Shanghai, ont passé en revue 21 recherches sur l’anxiété, incluant un total de 1.503 personnes. 14 études évaluaient l’effet de probiotiques : 7 testaient une seule souche probiotique, 2 testaient deux souches et 5 au moins trois souches. Les études restantes concernaient d’autres interventions susceptibles d’agir sur la flore intestinale : par exemple, deux études testaient un régime pauvre en FODMAPs (des glucides fermentescibles) chez des patients souffrant de syndrome de l’intestin irritable ; d’autres interventions évaluaient l’effet de prébiotiques, c’est-à-dire des fibres qui favorisent la croissance de « bonnes bactéries ». 

5 études associaient des traitements habituels de l’anxiété avec une intervention sur le microbiote, tandis que 16 études n’évaluaient que l’intervention sur le microbiote (probiotique ou autre méthode).

Les principaux résultats sont les suivants :

  • 11 études sur 21, soit un peu plus de la moitié, ont trouvé que l’intervention sur le microbiote soulageait l’anxiété. Parmi ces 11 études, 5 concernaient des probiotiques et 6 d’autres interventions. Pour les auteurs, « Nous trouvons que plus de la moitié des études incluses ont montré qu’il était positif de traiter les symptômes d’anxiété en régulant le microbiote intestinal »,
  • Sur les 16 études qui testaient uniquement l’intervention sur le microbiote, 56 % amélioraient les symptômes de l’anxiété. Plus précisément seulement 45 % des études sur les probiotiques étaient efficaces, contre 80 % des autres interventions,
  • Globalement, sur les 14 études qui avaient utilisé des probiotiques, seulement un tiers environ (36 %) ont trouvé une efficacité, alors que 6 études sur les 7 qui ont utilisé d’autres interventions étaient efficaces. Un changement alimentaire aurait donc un impact plus important sur le microbiote que la prise d’un complément probiotique seul. 

Comment expliquer ces résultats un peu décevants pour les probiotiques ? Nos aliments servent de source d’énergie pour les bactéries de notre flore intestinale. Pour modifier favorablement la composition du microbiote, il semble plus efficace d’agir sur le carburant des bactéries, qui va favoriser des souches « bénéfiques » déjà présentes, plutôt qu’en ajoutant de nouvelles bactéries probiotiques dans nos intestins. En effet, certaines souches probiotiques peuvent ne pas bien s’implanter dans l’intestin. De plus, ce ne seraient pas les bactéries elle-même qui agiraient sur le cerveau, mais ce qu’elles produisent à partir des aliments.

Comment la flore intestinale modifie l’humeur

Les probiotiques qui agissent sur le cerveau sont parfois appelés « psychobiotiques » par les chercheurs. Pendant quelques années, ces derniers ont pensé que les bactéries de la flore intestinale influençaient l’état émotionnel et psychique via une modification de l’activité du nerf vague, qui établit une connexion entre l’intestin et le cerveau.

D’autres équipes ont pointé du doigt que certaines souches bactériennes comme la souche probiotique Escherichia coli Nissle 1917, produisent du GABA. mais cette molécule ne passe pas depuis les intestins jusqu’au cerveau.

Récemment, une nouvelle piste solide et intéressante a été mise à jour : celle du rôle des acides gras à chaîne courte. Ces graisses particulières sont fabriquées dans notre intestin par les bactéries lorsqu’elles fermentent les fibres solubles des aliments (les “prébiotiques”). Elles passent ensuite dans le sang et exerceraient des effets anti-inflammatoires et anticancers. Les études animales ont pu mettre en évidence que ces acides gras à chaîne courte étaient antidépresseurs et anti-anxiété,

Pour améliorer sa santé psychique les compléments alimentaires de probiotiques sont donc logiquement d’une efficacité modeste : ils apportent des bactéries qui vont produire ces acides gras mais il faut aussi les nourrir; et cela se fait via l’alimentation. Les fibres des fruits et légumes sont celles qui permettent de produire le plus d’acides gras à chaîne courte dans l’intestin.

D’autres nutriments sont également pour la perméabilité intestinale et la santé de la flore, à commencer par la vitamine D3.

A lire également sur ce sujet :


Références :

  1. Yang et al. Effects of regulating intestinal microbiota on anxiety symptoms: A systematic review. General Psychiatry. 2019.
  2. Pérez-Berezo et al. Identification of an analgesic lipopeptide produced by the probiotic Escherichia coli strain Nissle 1917. Nature Communications. 2017.
  3. Bourassa et al. Butyrate, Neuroepigenetics and the Gut Microbiome: Can a High Fiber Diet Improve Brain Health ? Neurosci Lett. 2016
  4. Huang TT, Lai JB, Du YL, Xu Y, Ruan LM, Hu SH. Current Understanding of Gut Microbiota in Mood Disorders: An Update of Human Studies. Front Genet. 2019 Feb 19;10:98.

Avez-vous aimé cet article ?



Autres articles

Vous aimeriez peut-être aussi ?
separation_couleur1