Le facteur de transcription FoxO pilote la masse musculaire

Modifié le 14 décembre 2023

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Le facteur de transcription FoxO influe sur la masse musculaire, même en l'absence d'entrainement

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Prendre de la masse musculaire sans faire de sport, juste en avalant une pilule… Est-ce vraiment de la fiction ? Des chercheurs sont parvenus à provoquer une hypertrophie musculaire sans le moindre effort, du moins chez la souris. Leurs travaux, s’ils sont bien sûr loin d’être directement transposables à l’homme, éclairent sur le rôle d’un acteur essentiel impliqué dans la régulation de la masse musculaire : le facteur de transcription FoxO.

Des souris qui gagnent de la masse musculaire sans faire d’activité physique

L’équipe de recherche avait pour objectif de mieux comprendre ce qu’il se passe en cas de cachexie. Cette situation, caractérisée par une perte de poids involontaire et une atrophie musculaire, se manifeste en cas de dénutrition extrême ou lors de maladies graves comme le cancer.  Développer cet état pour un patient est un signe peu encourageant, qui limite les chances de rétablissement.

FoxO est un marqueur de la fonte musculaire

Les chercheurs se sont intéressés à un composé, FoxO (de l’anglais forkhead box O), dont la quantité augmente dans le muscle en cas de fonte musculaire. Ils sont parvenus à mettre au point une technique pour le neutraliser et ont testé ses effets chez des souris.

Deux groupes d’animaux étaient atteints d’une maladie propice à la survenue de cachexie (un cancer pour les uns, une infection du sang généralisée pour les autres), tandis que le troisième groupe était constitué d’animaux en bonne santé.

Dans les deux premiers groupes, l’administration de l’inhibiteur de FoxO est parvenue à enrayer la survenue de l’atrophie musculaire. Chez les souris en bonne santé, elle a eu un effet inattendu : elle a provoqué une hypertrophie des muscles, sans que les animaux n’aient été soumis à un quelconque entraînement physique. Ce résultat ne peut qu’inciter à se pencher de plus près sur le rôle et le mode d’action de FoxO.

Qu’est-ce qu’un facteur de transcription?

FoxO fait partie de la famille des facteurs de transcription, qui sont chargés de piloter l’expression des gènes.

Notre patrimoine génétique porte une multitude de gènes, qui ne sont pas tous actifs au même moment dans chacune des cellules de notre organisme. Certains s’expriment et permettent la fabrication de protéines aux rôles divers, tandis que d’autres restent silencieux.

Cette action ou inaction dépend de la présence de composés particuliers, les facteurs de transcription. Ils se fixent sur un gène donné et, à la manière d’un interrupteur, l’allument ou l’éteignent.

FoxO pilote la dégradation des muscles lors des situations extrêmes

La famille FoxO est composée de quatre membres chez les mammifères : FoxO1, FoxO3a et FoxO4, présents dans tout l’organisme et FoxO 6, rencontré spécifiquement dans les neurones.

Ces facteurs de transcription sont impliqués dans la différenciation et la prolifération des cellules. Ils exerceraient une influence sur la longévité des organismes, et pourraient jouer un rôle suppresseur de tumeurs. Ils assurent également une fonction essentielle au sein des muscles.

FoxO est impliqué dans l’atrophie musculaire

La quantité de FoxO augmente dans les tissus musculaires dans différentes circonstances : malnutrition, inflammation généralisée, cancer, maladies infectieuses, brûlure, défaillance cardiaque

Cette élévation du taux de FoxO provoque un état catabolique : les protéines musculaires sont dégradées, ce qui libère les acides aminés qui les constituent. Ces derniers peuvent alors être réutilisés par l’organisme pour fabriquer du glucose au niveau du foie par le biais du mécanisme de néoglucogenèse dans le but de fournir de l’énergie aux organes vitaux, ou pour fabriquer de nouvelles protéines.

Les muscles représentent la plus grande réserve en protéines de notre organisme, qui va être mobilisée lorsque nous devons faire face à une situation périlleuse. FoxO fait ainsi partie des mécanismes de survie sollicités en cas de situation extrême. Mais il y a bien sûr un prix élevé à payer : la destruction du tissu musculaire, qui peut rapidement devenir dommageable.

FoxO active les gènes permettant de dégrader les protéines musculaires

FoxO stimule l’expression de gènes impliqués dans la dégradation des protéines musculaires, comme ceux permettant la production :

  • de l’atrogine-1 et du MuRF-1, des enzymes qui se fixent aux myofibrilles constituant les muscles pour les dégrader
  • de la cathepsine L, une autre enzyme chargée de fragmenter les protéines, localisée dans le compartiment de la cellule permettant le recyclage des composants de l’organisme, le lysosome

FoxO va également bloquer l’expression d’autres gènes, comme celle du PGC‐1β par exemple, qui permet la fabrication d’un composé augmentant les dépenses énergétiques au sein des cellules. En agissant de cette manière, FoxO permet d’économiser l’énergie dans les périodes critiques.

FoxO maintient l’équilibre de la masse musculaire

Si FoxO est très actif dans ces circonstances, il joue également un rôle au sein des muscles en situation normale, maintenant l’équilibre musculaire. Il active l’expression de la myostatine, une protéine qui bloque la croissance du muscle. Elle maintient notamment les cellules souches musculaires (les cellules satellites) à l’état dormant et limite la synthèse des protéines.

Lorsque FoxO est neutralisé, le frein est levé, ce qui a conduit à l’hypertrophie musculaire observée chez les souris.

Lors d’un entraînement en résistance, la quantité de FoxO diminue

Pour prendre de la masse musculaire, FoxO doit donc être muselé. Des chercheurs se sont intéressés à l’évolution de son taux dans le muscle en pratiquant des biopsies chez des sportifs, tout d’abord lors d’une phase d’entraînement en résistance de 8 semaines, puis lors d’une phase d’inactivité. Au cours de la première période, qui a conduit à une hypertrophie musculaire d’environ 10 %, le taux de FoxO1 a baissé au sein des muscles. Durant la seconde phase, qui a provoqué une perte de 5 % de la masse musculaire, le taux de FoxO1 a augmenté.

L'entrainement en résistance provoque une diminution du taux de FoxO1, propice à la croissance musculaire
L’entrainement en résistance provoque une diminution du taux de FoxO1, propice à la croissance musculaire

L’évolution du taux de FoxO dans le muscle a été inverse à celle du taux de protéine kinase Akt sous forme active. Celle-ci fait partie de la voie de signalisation Akt/mTOR qui permet la synthèse des protéines indispensables au développement musculaire.

FoxO est réduit au silence par l’enzyme Akt

Quand la protéine kinase Akt est activée, lors de la pratique sportive ou lorsque l’organisme dispose d’une quantité suffisante de ressources (signalée par l’élévation du taux d’insuline et de facteurs de croissance IGF1), elle va transférer un groupe chimique phosphate au facteur de transcription FoxO. Cette réaction se déroule au sein de la cellule, dans le milieu liquide (le cytoplasme) qui l’emplit. Sous cette forme, FoxO devient captif du cytoplasme, et ne peut pas atteindre le noyau de la cellule où se trouvent ses gènes cibles. Il ne peut donc dès lors plus s’opposer au développement musculaire. 

En attendant de disposer d’un inhibiteur de FoxO, la seule solution pour le faire taire reste donc de s’entraîner et de ne pas s’affamer. La prise de vitamine D pourrait aussi donner un coup de pouce. En effet, des chercheurs ont récemment montré qu’elle prévient l’atrophie musculaire en tempérant l’activité de FoxO1.


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